La frontière de l'aube de Philippe Garrel
Festival de Cannes - En compétition
Synop : Une star vit seule chez elle, son mari est à Hollywood et la délaisse. Débarque chez elle un photographe qui doit la prendre en photo pour un journal, faire un reportage sur elle. Ils deviennent amants. Ils vont habiter deux semaines à l’hôtel pour faire ce reportage et repassent de temps en temps à l’appartement de la star.
Passé maintes et maintes fois au festival, mais n'est jamais reparti avec une récompense.
Il est venu notamment avec La cicatrice intérieure (2004), Elle a passé tant d'heures sous les sunlights (1985), Liberté la nuit (1984), Le berceau de cristal (1976), Le révélateur (1970), Le lit de la vierge (1969), Marie pour mémoire (1968) ...
Pour répondre aux questions des journalistes lors de la conférence de presse, Philippe Garrel, le réalisateur français de La Frontière de l’aube,
présenté aujourd’hui en Compétition, était entouré des comédiens Louis
Garrel, Laura Smet et Clémentine Poidatz, du chef-opérateur William
Lubtchansky et du producteur Edouard Weil. Extraits choisis.
Philippe Garrel sur le choix du noir et blanc :
"Si le film avait été en couleurs, il aurait été plus difficile de
faire accepter ces apparitions. J’ai copié Jean Cocteau, et comme
Cocteau tournait en noir et blanc, ça me paraissait évident. C’est
Henri Langlois qui m’avait dit de ne jamais abandonner le noir et
blanc, et je pense que ça ne disparaît jamais. Ce qui est passionnant
avec le noir et blanc, c’est qu’une fois le film fini, on le voit par
rapport à l’Histoire du cinéma en noir et blanc, et pas par rapport à
l’Histoire du cinéma en couleurs."
Laura Smet sur son personnage :
"Carole est un personnage magnifique, très sensible, une jeune femme
un peu paumée qui rencontre l’amour. Par rapport au personnage de
Clémentine, qui est magnifique et parfaite, Carole a quelque chose
d’irréel, c’est pour ça qu’elle réapparait. C’est la première fois que
j’ai pleuré en lisant un scénario. C’est très poétique. C’est une
histoire très forte, très fusionnelle entre deux personnes. Ca pourrait
même presque être un film muet."
Louis Garrel sur le fait de travailler avec son père :
"J’oublie forcément que c’est mon père quand on tourne. Je ne
construis pas des personnages, je suis comme l’envoyé ou le
missionnaire du metteur en scène, que ce soit mon père ou un autre. Je
m’inspire de lui, je le vampirise, je fais des mini-portraits."
Philippe Garrel à propos du surnaturel :
"Les scènes d’apparition sont construites de façon artisanale. Mais
on n’a pas pu faire ça en une prise : le mécanisme de l’apparition a
demandé beaucoup de répétitions et de concentration de la part des
comédiens comme de l’équipe. Les surréalistes, dont beaucoup étaient
des athées, ont traité le surnaturel comme un filon romanesque. Je
pense que c’est une bonne façon de traiter ce thème. Mais il n’y a rien
de plus déstabilisant que le surnaturel au cinéma."
Philippe Garrel sur la dimension romantique :
"Le film est vaguement inspiré d’une nouvelle de Théophile Gautier,
"Spirit". Dans cette nouvelle, il y a l’apparition d’une inconnue dans
un miroir. Elle demande à la personne qui la regarde de la rejoindre
dans la mort pour vivre avec elle dans l’éternité. C’est un mythe
romantique. Le premier titre du film, c’était "Le Ciel des anges", une
expression que j’ai trouvée chez Aragon. Et puis La Frontière de l’aube m’a paru légèrement plus inquiétant. Dans le film, il y a cette idée du diable, puisque le suicide, ça représente le diable."
Philippe Garrel sur la politique culturelle :
"Aujourd’hui, en France, 0,4 % du budget national est consacré à la
culture. Dans les années 80, on tendait vers le 1%, qui était en fait
autour de 0,8. Aujourd’hui, c’est donc la moitié, et ça explique tout.
Alors que, dans le même temps, toutes les professions de la culture
sont en développement et qu’on enseigne l’art aux enfants… C’est
complètement contradictoire. Si on veut faire des économies, très bien,
mais alors il faudrait aussi dégraisser les effectifs de la police…"